Quelle est donc la relation entre le café qui « passe » chaque matin dans notre cafetière, et le processus qui conduit un groupe terroriste à perpétrer un attentat à la bombe ? La physique nous enseigne que ces deux processus appartiennent à la même classe universelle de phénomènes que l’on appelle les phénomènes de percolation.
Que se passe-t-il lorsque l’on verse de l’eau chaude sur du café moulu ? L’eau doit se frayer un chemin parmi les mini-canaux créés par les grains de café, après avoir « imbibé » chaque grain. Selon les conditions expérimentales : taille des grains, compactage plus ou moins fort du café, pression de l’eau, forme du filtre,... l’eau arrivera à traverser le café ou pas : si elle y arrive, le café « passe » et l’on dit que l’on a atteint le seuil de percolation. Ce qui est remarquable, c’est que les caractéristiques de cette transition peuvent se modéliser à partir de deux paramètres universels qui dans le cas du café sont reliés à la densité de grains et à la probabilité de créer un chemin ou l’eau peut s’écouler entre deux grains. Selon la valeur de ces deux paramètres, on se trouve soit dans un régime de percolation : il y a un chemin continu d’une extrémité du système à l’autre (l’eau « passe ») ou un régime de non-percolation : l’eau ne passe pas. Et la transition entre ces deux régimes est d’autant plus brutale que le système comporte beaucoup d’éléments, ce qui est en général le cas dans la plupart des systèmes physiques : nous n’avons pas alors à nous préoccuper de la façon dont on passe d’un régime à l’autre : on y est ou on n’y est pas !
Les exemples d’application de la percolation sont très variés comme la propagation des épidémies ou, en sciences humaines et sociales, la propagation des rumeurs ou la propagation du terrorisme dans le monde ! Pour modéliser un feu de forêt par exemple, les paramètres significatifs seront la densité d’arbre et la facilité qu’a le feu pour se propager d’un arbre à l’autre. Ce dernier paramètre va alors dépendre de la sécheresse, du vent, de la nature des arbres,... Et les tranchées et la gestion judicieuse de la forêt va permettre d’agir sur le premier paramètre, pour s’assurer que l’on se trouvera toujours dans le régime de « non-percolation » : le feu ne pourra pas s’étendre très loin.